Salut,
ma situation est quand même pratiquement identique alors je pense qu'apporter ma pierre à l'édifice c'est pas mal...
Pour ma part, j'aurai 16 ans en septembre, ça fait plus de deux ans (printemps 2022) que j'ai pris conscience de ma transidentité, j'ai fait mon coming out à mes ami.e.s à mon entrée en 3ème (septembre 2022).
Concernant ma mère, je lui ai fait deux fois mon coming out.
La première fois (27 mars 2023), c'est sorti un peu tout seul...
(TW mention de r*gles et de termes pouvant causer de la dysphorie)
Faut savoir que mes règles me causent une dysphorie monstre (me causaient, maintenant je fais abstraction ou au moins j'essaie) et que j'ai d'ailleurs des problèmes de santé qui me causent des périodes de plusieurs mois sans, mais aussi et surtout des hémorragies plus ou moins régulièrement (scoop, le premier point me dérange beaucoup moins que le 2ème). On essaie depuis longtemps de comprendre ce que j'ai, (pour moi ça parait assez clair, avec une mère et une grand-mère atteintes d'endométriose, y a pas de raison que ce soit pas également mon cas) mais toujours est-il que malgré divers tests et échographies, la cause de mes emmerdements reste inconnue. (pour moi on a pas assez cherché mais bon malgré ses 150 000 habitants le Mans est un désert médical alors que voulez vous c'est compliqué...)
Et donc, c'était un soir, nous étions moi et ma mère en train de manger au restaurant après un RDV chez la gynéco et une échographie qui n'avaient absolument rien révélé de nouveau à part que j'étais méga anémique (information déjà connue par moi et ma mère...), et ma mère continuait de parler du verdict de la gynéco en me disant que "c'est rassurant t'as rien de grave" et moi je la contredisais, je répondais que j'étais dans une situation pas normale du tout et que si personne ne trouvait la cause c'était tout sauf rassurant, etc; en fait j'en pouvais plus, ça faisait un mois que je saignais sans discontinuer, j'étais vraiment à fleur de peau et je voulais juste qu'elle se taise et qu'on me laisse tranquille. Bref, toujours est-il qu'à mesure qu'on parlait je perdais mon calme de manière assez visible, semble-t-il, je me sentais de plus en plus mal, et à un moment ma mère s'arrête et me dit "on dirait que tu as peur"
Et elle commence à me demander de quoi, pourquoi... J'ai rien dit pendant un moment, je voulais plus parler, et puis j'ai fini par lacher en éclatant en sanglots "je veux pas être une fille, je veux pas être une fille"
Ma mère a bloqué puis "ah. Tu souffres d'être une fille ?"; j'ai juste hoché la tête, j'avais mal au ventre et je pouvais plus parler à part pour dire "j'ai froid"
Elle est allée payer, elle m'a mis dans la voiture et elle a rien dit pendant tout le trajet. En arrivant on s'est assis sur le canapé et j'ai eu un mal fou à m'exprimer, j'y arrivais pas, j'avais l'impression que tout tournait autour de mes problèmes de règles alors que pour moi y avait tellement plus que ça... Et surtout, j'arrivais pas à lui dire que c'était pas "je veux pas être une fille" mais plutôt "je veux être un garçon"
Malgré tout, j'avais l'impression qu'elle se montrait compréhensive, et elle m'a dit qu'elle m'aimait, que j'étais son enfant, etc.
Et puis le lendemain en parlant de nouveau de mes problèmes gynéco... "Tu es malade, j'en ai vraiment conscience maintenant. Je veux que tu comprennes qu'être une femme, c'est pas ça." Comprendre, t'as pas eu un bon aperçu de la vie d'une femme donc t'en as une image négative, c'est juste ça le problème, attends de guérir. Ah heu oui mais... Ben non, j'ai pas protesté, débattre me demandait trop de force. J'ai pas re-eu de nouvelles de ce coming out, qu'elle a semblé tout simplement oublier (le week end suivant elle insistait pour qu'on m'achète une jupe alors que j'avais dit non mille fois, attention je dis pas qu'un mec, trans ou cis, peut pas porter de jupes, juste moi je peux pas, du moins pour l'instant, question de mal être)
Jusqu'au jour où... J'ai dû ramener moi même le sujet sur le tapis parce que bah non elle en avait pas reparlé en 5 mois... C'était le 1er septembre 2023, je faisais ma rentrée le surlendemain, je m'étais fixé l'objectif de lui en reparler avant. Objectif réussi.
J'ai été plus clair cette fois, je lui ai dit que je voulais être un mec, c'était hors du contexte règles (j'étais dans une bonne passe haha, je les avais pas eues depuis 3 mois) donc c'était plus facile de ne pas mettre ça sur le boulversement émotionnel lié à mes problèmes de santé (d'ailleurs je dis pas que les problèmes que j'ai eus ne m'affectent pas dans ce sens hein, juste que je suis loin d'avoir uniquement ces préoccupations là)
Et donc elle s'est montrée à nouveau compréhensive, etc. Et le lendemain. désillusion. Elle m'a fait venir chez elle exprès déjà alors que j'étais chez mon père, et puis elle a commencé à me dire que je courais des risques, que les gens pouvaient être hostiles, que des gens allaient faire semblant de me soutenir pour tirer profit de moi en tant que mec trans, que ça serait trop handicapant d'être un mec avec ma taille (je suis vraiment petit c'est vrai, 1m54, mais bon, avec seulement 4 cm de plus, le chanteur Prince était tout de même une icone de la pop, comme quoi ça veut franchement rien dire, c'est juste un argument débile à partir d'un paramètre totalement arbitraire)
Et puis ces petites phrases... "Je ne veux pas que tu deviennes un transsexuel" Paaardon ? "Je n'ai pas envie de mentir, que ce soit à toi, à moi même ou aux autres, alors je ne dirai pas que tu es un garçon, parce que tu n'es pas un garçon" Aïe aïe aïe.
Bref, elle essayait de me dissuader alors qu'elle n'était absolument pas informée, elle avait l'air de penser que toutes les personnes trans faisaient l'objet de violences, de fétichismes et étaient aux prises avec des mafieux et des proxénètes (génial l'image franchement... Je ne lui ai pas dit qu'elle avait peut-être des personnes trans dans son entourage sans le savoir)
après, je comprends qu'elle s'inquiétait pour moi, c'est normal, mais bon...
Ce CO aussi a été "oublié".
Il y a donc un an que j'ai parlé pour la dernière fois à ma mère de ma transidentité, sans qu'elle ne soulève ce sujet à nouveau depuis. Pour autant, je suis politisé et je m'engage dans pas mal de mouvements, dont la lutte pour les droits LGBT+, et je n'ai pas cherché à le lui cacher ; je lui ai expliqué plusieurs faits d'actualité à ce sujet en lui donnant des informations, ça lui a tout de même permis d'apprendre des trucs mine de rien, et je pense pas qu'elle soit foncièrement hostile à la transidentité. C'est plutôt une terre inconnue pour elle, j'imagine qu'elle a préféré se le cacher en se disant que peut-être ça passerait plutôt que d'y faire face... C'est humain. (Bon je dis ça, ça m'empêche pas de mal le vivre et de vraiment lui en vouloir des fois, mais j'essaie de quand même me mettre à sa place et de pondérer mon propos)
Je rentre en première (avec la même classe que l'an dernier car je suis dans une section spéciale), tous mes camarades sont au courant que je veux être genré au masculin et être appelé A. Ils le respectent. Certains profs le savent aussi, et ne le font pas tous (m'enfin, je leur ai pas explicitement demandé et je peux pas les forcer tant que mes parents savent pas, pis j'ai eu un clash avec ma proviseure donc bon pour l'instant c'est compliqué)
Et depuis que j'ai commencé à pouvoir parler avec ma mère de mes engagements militants, je commence sérieusement à me dire que je vais lui en reparler... Mais pas de la même manière que es deux fois précedentes : je ne peux pas la faire aller plus vite que son rythme certes, mais autour les autres s'adaptent ou se sont déjà adaptés.
Je pense la prévenir que mes amis m'appellent A. et utilisent le pronom il, et inviter des amis de temmps en temps chez moi pour qu'elle puissent s'en rendre compte. Pour qu'elle puisse voir à quel point je suis épanoui sous une identité masculine. Je lui dirai (et à mon père aussi d'ailleurs je compte en parler) que je préfère être appelé et genré de cette manière et que je voudrais bien qu'elle fasse pareil mais que je sais que ça demande du temps (et puis je peux difficilement la forcer), et qu'elle peut me poser des questions si elle veut.
Alors après, si tu penses qu'elle est pas suffisament ouverte/safe pour supporter la nouvelle correctement, évite de trop insister quitte à te mettre en danger, mais autrement...
Peut être que si tu es out à tes amis tu peux essayer ça : l'aider à comprendre qu'en dehors de la sphère familiale tu es considéré de telle manière par tes ami.e.s, que c'est ce qui te convient le mieux, lui dire que tu voudrais bien qu'elle s'y mette aussi, et que tu restes ouvert à la conversation à ce sujet (tu peux peut-être aussi lui proposer de l'orienter vers une asso où elle pourrait rencontrer d'autres parents de personnes trans, s'informer, entendre des témoignages, etc.)
Je pense que d'établir le lien avec l'extérieur c'est le meilleur moyen de te sortir de cette situation, ça pourrait éviter qu'elle se dise que ça ne concerne qu'elle et que puisque personne d'autre n'en a connaissance elle à juste à planquer la chose sous le tapis pour que ça cesse d'exister.
Voilà voilà, c'était un beau racontage de vie, excuse moi pour ce message aussi long j'avais pas l'intention de faire un énorme pavé au départ mais enfin, j'espère vraiment avoir pu t'aider et je t'envoie tout mon soutien pour que tu te sortes de cette situation que je ne connais que trop bien !

(y a pas de smiley qui lève le poing, snif)