Je vis mal qu'on me dise "ça ne se voit pas".
Posté : 25 mai 2021 22:59
Bonsoir,
Je voulais exposer un point qui est revenu plusieurs fois ces derniers temps dans mon entourage amical : je vis mal le fait qu'on me dise que ça ne se voit pas. D'une part parce que ce n'est pas vrai et que ça nie toutes les injures transphobes ou tout simplement au féminin que je me prends régulièrement. Et pas plus tard que ce matin dans le métro, ce propos de la part d'un charmant quidam dirigé à mon encontre : "elle pue cette gouinasse" (d'ailleurs j'en profite pour me confier ici car si je me confie à mes amis, ils vont encore me sortir que ça ne se voit pas et que ce n'est pas possible, ce qui est une négation du vécu douloureux et aussi d'une réalité de la violence). J'étais interloqué par tant de violence de la part de cet inconnu (alors que je ne vois pas bien ce que j'ai pu lui faire). Je lui ai jeté un coup d'œil stupéfait et il me fixait en s'éloignant dans le couloir du métro pour voir si son insulte faisait son effet (il a sorti ça quand on est sorti du métro mais nous n'avons pas pris les mêmes sorties).
En fait, cette formulation consistant à dire "ça ne se voit pas" me fait vraiment du tort : car en plus des injustices subies comme celle racontée ci-dessus c'est une négation en bloc de mon vécu au quotidien découlant du regard des gens (alors même que certains de ces incidents sont déjà arrivés en présence de certains amis) d'autre part je n'aime pas qu'on m'assure que ça ne se voit pas parce que le fait que ça ne se voit pas est comme une sorte de censure imposée à l'incompréhensible ou à l'intolérable alors que ça devrait pouvoir ne pas être un tabou absolu. Je pense que je vis de manière beaucoup plus morale et avec un look beaucoup plus sage que beaucoup de personnes cis alors qu'on me laisse vivre, y compris avec cette particularité.
Maintenant quand on me dit "ça ne se voit pas" j'ai envie de dire : "si ça se voit, on me prend tantôt pour une fille tantôt pour un mec, tantôt on ne sait pas ce que je suis donc oui ça se voit que je suis une personne non cis et oui ça me pose régulièrement des soucis dans ma vie quotidienne. Pas la peine de me mentir. "
Je pense que même de la part de personnes bien intentionnées et ouvertes, c'est encore l'effet d'une norme de se sentir obligé de confirmer que ça ne se voit pas (et c'est vraiment toujours le cas chez mes amis. Personne ne m'a jamais dit "on ne sait pas trop, c'est vrai mais on t'aime comme ça" (ou en un peu moins maladroit mais j'ai la flemme de trouver la formulation juste et ce n'est pas évident).
Je voulais voir si mon sentiment était partagé par certains. En tout cas, au bout de 15 ans de transition, pour ma part je ne veux vraiment plus me voiler la face en me disant que mon passing est infaillible et j'ai envie d'être accepté comme je suis.
Bonne soirée
J'ajoute une chose -même si c'est un peu un autre sujet mais ça reste dans le thème visible/invisible - je vis très mal qu'on s'étonne que je prenne un traitement et que je doive rappeler que c'est parce que je suis trans et qu'on me réponde "ah bon, il faut prendre un traitement pour ça?" avec de grands yeux étonnés : bah oui, ce n'est pas la fée clochette qui me transforme elle-même avec sa baguette...bref, j'ai peut-être finalement besoin d'être vu -pas seulement mais "aussi"- comme une personne trans car j'en ai marre de porter ce vécu tout seul sans pouvoir me confier. Je me dis aussi qu'en l'exposant, ça pourrait rendre les choses plus légères pour moi mais peut-être que ce vécu est tout simplement trop violent pour les autres et qu'ils l'occultent par conséquent, je ne sais pas.
Je voulais exposer un point qui est revenu plusieurs fois ces derniers temps dans mon entourage amical : je vis mal le fait qu'on me dise que ça ne se voit pas. D'une part parce que ce n'est pas vrai et que ça nie toutes les injures transphobes ou tout simplement au féminin que je me prends régulièrement. Et pas plus tard que ce matin dans le métro, ce propos de la part d'un charmant quidam dirigé à mon encontre : "elle pue cette gouinasse" (d'ailleurs j'en profite pour me confier ici car si je me confie à mes amis, ils vont encore me sortir que ça ne se voit pas et que ce n'est pas possible, ce qui est une négation du vécu douloureux et aussi d'une réalité de la violence). J'étais interloqué par tant de violence de la part de cet inconnu (alors que je ne vois pas bien ce que j'ai pu lui faire). Je lui ai jeté un coup d'œil stupéfait et il me fixait en s'éloignant dans le couloir du métro pour voir si son insulte faisait son effet (il a sorti ça quand on est sorti du métro mais nous n'avons pas pris les mêmes sorties).
En fait, cette formulation consistant à dire "ça ne se voit pas" me fait vraiment du tort : car en plus des injustices subies comme celle racontée ci-dessus c'est une négation en bloc de mon vécu au quotidien découlant du regard des gens (alors même que certains de ces incidents sont déjà arrivés en présence de certains amis) d'autre part je n'aime pas qu'on m'assure que ça ne se voit pas parce que le fait que ça ne se voit pas est comme une sorte de censure imposée à l'incompréhensible ou à l'intolérable alors que ça devrait pouvoir ne pas être un tabou absolu. Je pense que je vis de manière beaucoup plus morale et avec un look beaucoup plus sage que beaucoup de personnes cis alors qu'on me laisse vivre, y compris avec cette particularité.
Maintenant quand on me dit "ça ne se voit pas" j'ai envie de dire : "si ça se voit, on me prend tantôt pour une fille tantôt pour un mec, tantôt on ne sait pas ce que je suis donc oui ça se voit que je suis une personne non cis et oui ça me pose régulièrement des soucis dans ma vie quotidienne. Pas la peine de me mentir. "
Je pense que même de la part de personnes bien intentionnées et ouvertes, c'est encore l'effet d'une norme de se sentir obligé de confirmer que ça ne se voit pas (et c'est vraiment toujours le cas chez mes amis. Personne ne m'a jamais dit "on ne sait pas trop, c'est vrai mais on t'aime comme ça" (ou en un peu moins maladroit mais j'ai la flemme de trouver la formulation juste et ce n'est pas évident).
Je voulais voir si mon sentiment était partagé par certains. En tout cas, au bout de 15 ans de transition, pour ma part je ne veux vraiment plus me voiler la face en me disant que mon passing est infaillible et j'ai envie d'être accepté comme je suis.
Bonne soirée
J'ajoute une chose -même si c'est un peu un autre sujet mais ça reste dans le thème visible/invisible - je vis très mal qu'on s'étonne que je prenne un traitement et que je doive rappeler que c'est parce que je suis trans et qu'on me réponde "ah bon, il faut prendre un traitement pour ça?" avec de grands yeux étonnés : bah oui, ce n'est pas la fée clochette qui me transforme elle-même avec sa baguette...bref, j'ai peut-être finalement besoin d'être vu -pas seulement mais "aussi"- comme une personne trans car j'en ai marre de porter ce vécu tout seul sans pouvoir me confier. Je me dis aussi qu'en l'exposant, ça pourrait rendre les choses plus légères pour moi mais peut-être que ce vécu est tout simplement trop violent pour les autres et qu'ils l'occultent par conséquent, je ne sais pas.