La Transidentité confondue avec les souffrances passées

Astuces, questionnements et conseils pour passer au masculin sans aide médicale
Avatar du membre
Ange1818
Pierre moussue
Pierre moussue
Messages : 603
Enregistré le : 27 mai 2018 19:33
Localisation : Champagne-Ardenne
Situation : Trans
Genre : Homme
Pronoms : Il
Suivi psy : Oui
Hormoné : Oui
Prénom : Oui
État civil : Oui

Re: La Transidentité confondue avec les souffrances passées

Message par Ange1818 » 26 oct. 2019 20:24

Je crois que pour les regards extérieurs, comme la transidentité apparaît comme quelque chose de véritablement exceptionnel et de méconnu, ce n'est pas surprenant que nos proches nous reprennent en pensant que nous confondons transidentité avec une autre forme de mal-être, parce que c'est plus simple et que ça semble plus logique pour eux de raccorder ça à quelque chose de familier et qu'ils maîtrisent mieux ; et de même, c'est plus simple de considérer la transidentité comme la conséquence de souffrances que nous aurions vécues car c'est ce qui permet à certaines personnes en situation de méconnaissance totale du sujet de lui donner du sens. Je crois que c'est un argument qui reviendra souvent et avec lequel un certain nombre d'entre nous auront à composer.

Certaines personnes de mon entourage oscillent entre ces deux interprétations, ma mère en premier lieu qui pense que je me trompe en transitionnant médicalement, et le sujet s'était déjà imposé au commencement de mes questionnements, quand j'ai abordé le sujet de ma transidentité avec mon psychiatre : il a prétendu que je n'étais pas trans et que mon histoire m'avait simplement dégoûté des femmes, que c'était la raison pour laquelle je pensais à transitionner, et que je devais juste apprendre à accepter d'en être une. J'admets bien piteusement avoir eu bien trop longtemps de la rancœur envers les personnes correspondant aux clichés féminins que l'on m'imposait car je ne parvenais pas à les imiter, mais ce n'était pas de la haine et j'ai pu déconstruire toutes les idées reçues que j'avais sur les femmes durant mes phases de questionnements en éliminant progressivement tous les stéréotypes que j'avais ingurgités. Je me suis tout de même penché sur le sujet pour examiner cette perspective et ainsi m'assurer de ne pas faire fausse route ; et si j'examine mon histoire, je peux en venir à l'idée que mon vécu m'a donné tout autant de raisons (si ce n'est plus) de haïr les hommes que les femmes, et que cette théorie ne tient pas la route.
Pour faire court (enfin, autant que possible), histoire parentale sous fond d'alcoolisme (problème qui revient dans mon arbre généalogique dans toutes les générations du côté paternel comme maternel), divorce violent, développement d'une maturité précoce dans certains domaines qui ont laissé penser que j'étais surdoué alors que les tests sont revenus négatifs, infidélités de mon géniteur qui envoyait ses multiples conquêtes enfoncer la porte de chez moi pour nous menacer de mort, qui m'appelait alors que j'avais 8 ans pour me dire qu'il allait se suicider, ma mère qui cherchait à le sauver, encore ce même géniteur qui a eu des gestes déplacés envers moi alors même que j'étais un bébé et qui a gravé des images très dérangeantes à ce sujet dans ma mémoire entre mes 5 et 8 ans, son décès par alcoolisme, les crises de plus en plus virulentes de ma mère qui semble être fragmentée en deux parties dont l'une est capable du pire, du harcèlement scolaire… Avec tout ça, j'avais amplement de quoi justifier un mal-être chez moi, notamment sur le plan corporel qui me posait grandement problème ; alors naturellement, avant de savoir qu'il était possible d'être trans, j'ai mis ce mal-être intégralement sur le compte de séquelles de ce passé. Ma phobie sociale en est assurément une conséquence par exemple ; mais il y avait également autre chose dans mes relations avec les autres qui clochait et je n'arrivais pas à raccorder ce quelque chose avec mon histoire. Et quand j'ai découvert que j'étais trans, un certain nombre de ces choses ont pris du sens ; néanmoins, en prolongation de ces premières pensées, je me suis assez vite demandé si la transidentité n'était pas une conséquence de mon passé, mon psychiatre pensant là encore que "je voudrais être un homme pour prendre le rôle de dominant et éviter de nouveau des abus", (au passage, je crois que si les choses fonctionnaient nécessairement de cette manière, nous serions beaucoup plus nombreu.x.se.s à être trans). Aujourd'hui, cette interprétation ne me semble pas cohérente. Elle est peut-être vraie dans certains cas, je n'en sais rien, mais je trouve cette théorie un peu simpliste et je ne parviens pas à lui trouver de sens.
Dans tous les cas, je ne considère pas le moins du monde que mon vécu ait "provoqué ma transidentité" ou qu'elle ne me soit apparue pour justifier d'autres souffrances. Je n'ai qu'une expérience particulière et individuelle à partager ici qui pourrait laisser entendre que c'est le cas, mais il en existe bien d'autres où des personnes qui n'ont pas forcément vécu de choses difficiles peuvent être trans. Voir la transidentité comme une séquelle me semble peu inclusif, pour ne pas dire réducteur face à la complexité du fonctionnement humain, et ça montre juste à quel point c'est vu comme une anomalie, une séquelle, quelque chose de foncièrement négatif. Et dans tout ça, il ne faut pas oublier non plus que certain.e.s trans ne souffrent pas : estimer que la transidentité serait une séquelle semble être une erreur sous ce point de vue encore. Et comme l'a très bien dit PauSG, quand bien même la transidentité serait la conséquence d'un passé, ça ne changerait en rien notre légitimité et nos ressentis.

Je pense que quand on a un vécu susceptible de créer un mal-être et qu'on envisage d'être trans, il n'est pas déraisonnable d'examiner notre passé et d'en tirer les conclusions qui nous semblent les plus logiques pour ne pas se précipiter trop hâtivement vers ce qu'on pense être la solution. Je ne m'étonne pas que certaines personnes de mon entourage passent par cette interprétation puisque je l'ai explorée avant de la rejeter. Je l'accepte, même si ça me blase car j'ai dépassé toute réflexion de ce genre depuis un certain temps. Et pour les personnes qui pensent qu'on pense que la transidentité n'est pas l'explication de notre mal-être, elles seront assez vite contredites face à l'évolution de nos parcours respectifs. Tant que l'intérêt qu'elles nous portent est bienveillant, il ne faut pas le prendre comme une injure ; si c'est utilisé comme argument pour nous attaquer, c'est une autre histoire...

J'espère que tu te remets du message de ton frère, Axel, car certains de ses propos ont pu te heurter et on voit pourquoi. Le passage sur "la nature qui donne une apparence" fait mal même si on sait que cet argument n'a pas de fondement. J'espère qu'il comprendra et qu'il changera d'avis sur la question. :-)

Axel78
Gravier
Gravier
Messages : 44
Enregistré le : 01 juil. 2019 18:45
Localisation : Île-de-France
Situation : En questionnement
Pronoms : il

Re: La Transidentité confondue avec les souffrances passées

Message par Axel78 » 05 nov. 2019 13:02

PauSG tu as reçu mon mp?

Avatar du membre
PauSG
Gentil Modo
Gentil Modo
Messages : 2134
Enregistré le : 30 oct. 2016 22:56
Localisation : Paris
Situation : Trans
Genre : Mec trans
Pronoms : il
Suivi psy : Oui
Hormoné : Oui
Chirurgie du torse : Oui
État civil : Oui
Contact :

Re: La Transidentité confondue avec les souffrances passées

Message par PauSG » 05 nov. 2019 15:44

Bonjour Axel, je viens de te répondre. On ne peut pas toujours répondre dans la minute ;)
Le blog de mon parcours: http://transboiramble.blogspot.fr/

Répondre